Jean sans Terre aborde au dernier Port
Jean sans Terre aborde au dernier Port
Première version
à Claire sans Lune
Jean sans Terre sur un bateau sans quille
Ayant couru les mers sans horizon
Débarque un jour sans aube au port sans ville
Et frappe à quelque porte sans maison
Il reconnaît la femme sans figure
Se décoiffant dans un miroir sans tain
Le lit sans repos L'amour sans murmure
Et le chagrin du soir dès le matin
Et dans les docks où pourrit le silence
Où sèchent les soleils cueillis trop verts
Les goélands ayant perdu patience
S'en sont allés vers d'autres univers
Les dockers qui déchargent joie et peine
Les berceaux exportés les cercueils importés
Les fûts sans huile et les tissus sans laine
Sifflent en vain des chants de liberté
Ces cuirs ne deviendront jamais semelles
Ces cotons ne vêtiront pas les nus
Ces bois ne lanceront pas d'étincelles
Ces blés ne feront pas de pains grenus
Quel est ce port où personne n'aborde ?
Quel est ce sombre cap sans continent ?
Quel est ce phare sans miséricorde ?
Quel est ce passager sans châtiment ?
[ Jean sans Terre - Landless John, p.27, 1ère Version]
JST Seghers 1957 p.182/183