Jean sans Terre épouse la Lune Deuxième Version
Jean sans Terre épouse la Lune
Deuxième Version
Lorsque Jean sans Terre
Boit en pleine nuit
La bière lunaire
Qui mousse sans bruit
Il boit goutte à goutte
Il boit fort et sec
Mais il boit le doute
Et l'angoisse avec
Car le solitaire
Aura soif toujours
Rien ne désaltère
Le buveur d'amour
Le blême liquide
Partout répandu
Infuse aux coeurs vides
Le rêve perdu
Mais trop de lumière
Ne fait que voiler
Les mille mystères
De l'ange étoilé
Lune inoxydable
Nénuphar d’éther
Ta neige de sable
Brûle notre chair
Ton sein d'amazone
Glabre et virginal
Incite les hommes
A chérir le mal
Lourde d'amours louches
Avec Belphégor
Ta panthère accouche
Des chiens du remords
Tu nourris la race
Du sombre Nadir
L'engeance vorace
Qui nous fait mourir
Mais les nuits où lasse
Soudain tu maigris
Ta cruche se casse
Et ton lait s'aigrit
Les amants oublient
Soudain leur ferveur
Toute la magie
Se transforme en peur
La voix des effraies
Tourmente ta peur
Et dans l'oseraie
L'ombre des vapeurs
Sous les météores
Que l'espace éteint
Sois la mandragore
Dans un lit de thym
Tu n’es plus la Rousse
Fatale aux humains
Ta bière s’émousse
Et devient venin
Et sur les décombres
Des palais vermeils
Le monde des ombres
Retourne au sommeil
Inédit Seghers p.87 à 89 13 quatrains ( 17 dans la première version )